Page:Dupont - Chants et Chansons, t. 1, 1855.djvu/30

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au sabre ou à l’opinion ; ce ne sont plus des républicains de la veille ou du lendemain qu’il nous faut, ce sont des hommes libres, sûrs de leur droit, et maîtres de leur destinée.

Je me laisse emporter par le courant général et oublie que la Saône et ses îles de saules ont des murmures plus doux. Je suis loin des rêves rustiques et des inspirations calmes du Ménale et de l’Alphée. Qui nous donnera ces loisirs ?

L’ère nouvelle est restaurée, les artistes vrais n’ont pas laissé tomber leurs pinceaux après la crise et n’ont pas grossi le chœur des plaintes hypocrites. Le mouvement industriel s’est agrandi, et une nation qu’on disait égoïste a ouvert le port de la Tamise aux produits du monde entier. Il semble qu’une nouvelle renaissance attende son éclosion. Qu’elle apparaisse pour ne plus s’éteindre, non plus sujette aux caprices des familles princières,qui à leur gré protègent les arts ou les abandonnent à l’oubli. Que le xixe siècle ne rebrousse pas chemin jusqu’à la décadence de l’empire de Rome. Que le dernier de tous constate son égalité par sa virtualité propre et la revendication de son droit ; qu’il ne reste pas un ilote dans la République moderne. Artistes, savants, ouvriers, paysans ! un homme de ce temps-ci vient d’en faire l’aveu, la politique n’a pas de cœur. Il faut rompre avec ces traditions menteuses, et inaugurer dans le monde, par le travail, la science et l’amour, le règne de la vérité.

Paris, 20 Juillet 1851.
PIERRE DUPONT.