Page:Dupuis - Abrégé de l’origine de tous les cultes, 1847.djvu/413

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à la morale naturelle avant que la morale religieuse s’en emparât, et rarement elles ont gagné à cette adoption. C’est dans ce sens que le peuple sera éclairé, si, au lieu de cette lueur fausse que donne à ces vérités le prestige religieux, on laisse briller la lumière de la raison dans tout son éclat, sans y mêler les ombres du mystère. L’ignorance absolue des erreurs laisse l’âme neuve, telle qu’elle est sortie des mains de la Nature ; et, dans cet état, elle peut mieux raisonner ses devoirs que lorsqu’elle est déjà corrompue par l’éducation et par la fausse science. Hélas ! qu’il y a bien peu d’hommes qui aient été assez heureux pour détruire les préjugés de leur éducation, fortifiés par l’exemple et par l’habitude, et qui à force de philosophie aient pu effacer le souvenir de ce qu’on leur a appris à grands frais ! C’est sous ce rapport que le peuple sera éclairé quand on ne lui dira rien dont il ne trouve déjà la raison dans son propre cœur. C’est ainsi que l’on pourra, sur un terrain neuf, élever l’édifice d’une éducation simple, fondée sur les notions naturelles du juste et de l’injuste, et même de l’intérêt personnel, qui, bien entendu, lie l’homme à son semblable et à la patrie, et qui lui apprend que l’injustice qu’il fait aujourd’hui, il peut l’éprouver demain, et qu’il lui importe de ne pas faire à autrui ce qu’il ne voudrait pas qui lui fût fait à lui-même. Toutes ces idées peuvent être développées sans avoir recours à l’intervention du Ciel ; et alors l’éducation sera bonne, parce que les vérités qu’elle enseignera sont éternelles, et que la raison dans tous les temps