Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/206

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brusquement. Sur le seuil de la porte, il se retourna et étendit le bras d’un air menaçant vers Bagot : — Tu sais, Bagot, dit-il, à la prochaine fois, je ne te fendrai pas la tête qu’à moitié.

— Oh ! on me la recolle exprès, répliqua le blessé, ça la durcira, tu pourras cogner, je jouerai un peu mieux. En attendant, tu n’es plus beau !

Les deux braconniers sortirent. Aussitôt Volusien se dirigea du côté des bois.

— Où vas-tu donc ? demanda Guillaume avec colère.

— Eh ! sacrebleu, dit Volusien, il faut de la prudence. Ne veux-tu pas aller te montrer avec une figure arrangée de la sorte. Tu arrives, c’est pour te battre. Bagot est un sournois, tu auras quelque plat de son métier. Viens sous bois, nous chasserons un peu. Il ne faut pas songer à entrer à Mangues en plein jour.

Volusien pensait toujours a gagner du temps. La bataille qui venait d’avoir lieu le poussait encore plus à avertir Lévise. Il ne désirait pas avoir maille à partir avec les autorités et les gens « puissants ». Comme braconnier, il était plus rusé que Guillaume, et ne se laissait jamais prendre en faute. Il eût presque souhaité que ce fût son ami, et non Bagot, qui eût eu la tête fendue dans la bagarre.

Guillaume marcha silencieux, sombre, à côté de lui pendant quelques instants. Puis tout à coup il s’arrêta et dit :

— Es-tu sûr de la chose, maintenant, couard que tu es ? As-tu assez bien avalé la chanson ? Et tu n’as rien dit, tu ne dis rien. Alors c’est que ça te convient. Les gamins viendront te tirer par ta blouse en te chantant les belles choses qu’a faites ta sœur ! Tu étais un braconnier, bon, ça n’est pas déshonorant ; on se bat, ça prouve qu’il faut