Page:Duranty - Le Malheur d’Henriette Gérard.djvu/226

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M. Germain pour me donner à ce M. Mathéus, sans raisons, sans motifs. Si je n’aimais pas M. Germain, il me serait peut-être indifférent d’épouser l’autre. Et puis, je vois qu’on me trompe ! Ah ! que je vous serais reconnaissante, Madame, si vous vouliez bien être mon amie, mon appui, et m’informer de ce qui se passe réellement !

— Je parlerai à votre mère, chère petite belle ; il est trop dommage de vous voir triste.

— Ah ! si vous pouviez arriver à faire cesser mes inquiétudes ! Si je pouvais avoir des nouvelles d’Ém… de M. Germain !

— J’essayerai auprès de vos bons parents. Cependant, dit madame Baudouin, qui s’étonnait d’avoir changé de camp si promptement, vous les avez trop irrités lundi. Vous ne deviez pas faire…

— Mais, Madame, lorsqu’on n’a pas d’autres moyens à employer ! On me pousse à bout. Concevez-le. Je voyais ce M. Mathéus venir à la maison, sans savoir ce qu’il voulait. On m’avait promis de tout arranger avec M. Germain ! Je n’ai pas été maîtresse de ma colère. Mettez-vous à ma place. Je ne pouvais agir autrement pour défendre à la fois M. Germain et moi.

— Pourtant, ce M. Mathéus est un très digne homme, et vous l’avez traité…

— Est-il donc bien noble et bien digne à toi de vouloir m’épouser malgré moi ?

— Mais il vous aime, ma chère enfant !

— Que puis-je y faire ? C’est donc là pourquoi on veut sacrifier mon avenir à son caprice, comme si j’étais l’étrangère, moi, et que lui fût l’enfant de la maison ? Enfin, pensez-vous que mon père et ma mère ont absolument raison ? »

Ce discours, où à la plus grande sincérité se joignait, bien pardonnable, un certain calcul d’effet à produire sur l’esprit peu subtil de madame Baudouin, ébranla celle-ci.

« Je n’avais pas envisagé cela de la sorte, ma toute belle petite, reprit-elle, vous m’avez éclairée. Il est si difficile de se reconnaître au milieu des question les plus simples !

— Je vous remercie du fond du cœur, dit Henriette, de