Une pareille entrée en effet, était capable de nuire à l’amour.
« Votre camériste a un vice dans la langue, dit le chevalier Aristide, pensant être élégant.
— Est-ce que vous désiriez voir M. Vieuxnoir ? dit la petite créature, feignant de ne point prendre la visite pour elle.
— Non, Madame c’est vous-même que je voulais avoir le plaisir et l’honneur de visiter, reprit Aristide, content de sa phrase.
— Que c’est aimable à vous ! je pensais que vous veniez pour le procès. »
Aristide fut ravi de tomber sur un sujet de conversation, car il ne savait, autrement, comment commencer.
« Oh ! le procès, dit-il, c’est une bêtise de notre voisin. »
Il était assis sur une chaise en face du canapé, glorieux de sa mise, fier de son émancipation, et dévorait de ses gros yeux madame Vieuxnoir, nonchalamment penchée vers lui.
« Madame votre mère a montré beaucoup de tête dans cette affaire, reprit celle-ci ; c’est une dame bien remarquable… »
En ce moment, la petite avocate se rappela qu’elle avait des bas de deux jours, et elle retira ses pieds sous sa robe ; mais les jupes n’étaient pas assez longues. Aristide suivit le mouvement et vit les bas ; mais il n’en fut point contrarié : en province, on est habitué à l’économie.
« On n’en voit pas beaucoup comme ça, » dit Aristide.
Madame Vieuxnoir ne sut s’il parlait de sa mère ou des bas. Elle était inquiète.
« Mais, ajouta le jeune homme, elle n’est pas encore tant qu’on dit ! »
La petite avocate était désolée de n’avoir point prévu la venue d’un homme en gants rose tendre, et, dans sa préoccupation, elle ne prenait point garde au langage peu heureux de ce beau garçon.
« Malgré ça, reprit Aristide, elle est le chef de la famille ; mon père est moins qu’elle à la maison.
— C’est un ménage si uni ! » répondit madame Vieuxnoir,