Page:Duranty - Le Malheur d’Henriette Gérard.djvu/327

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ne se rendait compte que d’un désir ardent de retourner aux Tournelles.

Enfin Mathéus annonça la visite des appartements.

On parcourut les grandes salles, les corridors, les petites pièces, et on arriva devant une porte blanche dont les ornements dorés figuraient encore une grande H.

Mathéus ouvrit avec un peu de solennité, et l’on vit une jolie chambre à coucher de femme, tout en lilas clair ; rideaux de dentelles, meubles dorés, glaces superbes.

« Voilà le nid, dit madame Gérard.

— Il ne faudra pas en fermer trop souvent la porte à M. Mathéus, » ajouta en riant la grosse Baudouin.

Henriette regarda malgré elle cette chambre avec intérêt et se demanda :

« Comment se fait-il qu’un pareil homme ait du goût ? Si Émile avait été riche, je voudrais savoir comment il aurait organisé ma chambre.

— Aujourd’hui vous partez, dit Mathéus ; quand donc viendra le jour où vous ne vous en irez pas ?

— Je ne sais pas », dit Henriette. Et elle ajouta : « Vous vous êtes donc rappelé mes goûts ? Elle est jolie cette chambre ! »

Il lui prit la main.

« Ah ! s’écria-t-il joyeux comme un enfant.

— Il est trois heures, ajouta la jeune fille, mon père doit être inquiet.

— Eh ! mon Dieu ! partons, dit madame Gérard impatientée. Monsieur Mathéus, vous revenez avec nous. »

Henriette sentit ses troubles s’apaiser un peu en roulant vers les Tournelles, et lorsqu’elle rentra dans sa chambre pour changer de toilette, un bain ne lui aurait pas paru plus tiède, plus délassant. Elle éprouvait du plaisir à se coiffer, à se laver les mains, à attacher les épingles de sa robe, et à être bien sûre que les murs de cette petite chambre blanche l’entouraient. Son courage s’y retrempa.

« Ils ont beau faire, se dit-elle, je ne suis pas encore mariée, et, à les entendre aujourd’hui, j’aurais pu m’effrayer : « Voilà le nid ; vous serez bien ici. Mon chiffre partout ! » Je