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Page:Duras - Ourika et Édouard, II.djvu/101

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LE MARCHAND DE ZAMORA.

Fils d’un paysan ! répéta Gavino en homme frappé de cette parole. — Oui, fils d’un paysan du village où je suis né. Notre amitié date du berceau.

« — Mon médecin est obligeant, dis-je, quand il fut parti. — Oui, reprit Gavino, j’ai lieu de m’en applaudir. Il paraît à son aise. L’état qu’il exerce tire ses revenus des souffrances humaines ; la ferme est bonne : on peut même aller loin ; son ami est devenu un grand personnage. Voisin, je songe à une chose. — Je la devine. — Pourquoi Fabrice ne serait-il pas médecin ? Par une autre route il arriverait, comme son frère, aux honneurs ; car la médecine, si elle ne devait pas lui servir de marchepied, ne remplirait pas mes vues. Qu’en dites-vous, cher Gaspard ? Mon fils est jeune, le médecin du roi doit être vieux, voilà une succession à recueillir. — Prenez garde, il y aura foule ; chacun se croira des droits à l’héritage. — Oui ; mais si son frère le général l’appuie de son crédit, le roi pourra-t-il refuser ? Que vous en semble ? je place assez bien mes enfants dans ce monde.

« Je fus d’abord tenté de rire à cette nouvelle chimère de Gavino ; j’aimai mieux toutefois le laisser doucement rêver. Je fis plus : je me mis à rêver avec lui.

« Gavino se hâta. Ses deux fils étant sortis du collége, leur départ se fit avec solennité. Après