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Page:Duras - Ourika et Édouard, II.djvu/31

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ÉDOUARD.

obéir aux conseils d’Eugénie et conduire ma personne au bal ; mais, Édouard, n’avez-vous jamais senti que mon âme était errante autour de vous, que la meilleure moitié de moi-même restait près de vous, qu’elle ne pouvait pas vous quitter ! » — Je tombai à ses pieds. Ah ! si j’avais osé la serrer dans mes bras ! Mais je n’avais que de froides paroles pour peindre les transports de mon cœur. Je lui redis mille fois que j’étais heureux ; que je défiais tous les malheurs de m’atteindre ; que ma vie se passerait près d’elle à l’aimer, à lui obéir ; qu’elle ne pouvait rien m’imposer qui ne me parût facile. En effet, mes chagrins, mes remords, son rang, ma position, la distance qui nous séparait, tout avait disparu ; il me semblait que je pouvais tout supporter, tout braver, et que j’étais inaccessible à tout ce qui n’était pas l’ineffable joie d’être aimé de madame de Nevers. « Je ne vous impose qu’une loi, me dit-elle, c’est la prudence. Que mon père ne puisse jamais soupçonner nos sentiments : vous savez assez que s’il en avait la moindre idée, il se croirait profondément offensé ; son bonheur, son repos, la paix de notre intérieur seraient détruits sans retour. C’est de cela que je voulais vous parler, ajouta-t-elle en rougissant ; voyez, Édouard, si je dois ainsi rester seule avec vous ? Je vous ai dit tout ce que je ne voulais pas vous dire ; hélas ! nous ne savons que trop