Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/117

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sont nullement organisées en vue de fins individuelles. Sans doute, il arrive parfois qu’elles ont pour effet de développer chez l’individu des aptitudes particulières qui y étaient immanentes et qui ne demandaient qu’à entrer en acte : en ce sens, on peut dire qu’elles l’aident à réaliser sa nature. Mais nous savons combien ces vocations étroitement définies sont exceptionnelles. Le plus généralement, nous ne sommes pas prédestiné par notre tempérament intellectuel ou moral à une fonction bien déterminée. L’homme moyen est éminemment plastique ; il peut être également utilisé dans des emplois très variés. Si donc il se spécialise et s’il se spécialise sous telle forme plutôt que sous telle autre, ce n’est pas pour des raisons qui lui sont intérieures ; il n’y est pas poussé par les nécessités de sa nature. Mais c’est la société qui, pour pouvoir se maintenir, a besoin que le travail se divise entre ses membres et se divise entre eux de telle façon plutôt que de telle autre. C’est pourquoi elle se prépare de ses propres mains, par la voie de l’éducation, les travailleurs spéciaux dont elle a besoin. C’est donc pour elle et c’est aussi par elle que l’éducation s’est ainsi diversifiée.

Il y a plus. Bien loin que cette culture spéciale nous rapproche nécessairement de la perfection humaine, elle ne va pas sans une déchéance partielle, et cela alors même qu’elle se trouve en harmonie avec les prédispositions naturelles de l’individu. Car nous ne pouvons développer avec