Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/139

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la même sérénité que pour les hommes du XVIIe siècle. Il ne s’agit plus de mettre en œuvre des idées acquises, mais de trouver des idées qui nous guident. Comment les découvrir si nous ne remontons pas jusqu’à la source même de la vie éducative, c’est-à-dire jusqu’à la société ? C’est donc la société qu’il faut interroger, ce sont ses besoins qu’il faut connaître, puisque ce sont ses besoins qu’il faut satisfaire. Se borner à regarder au-dedans de nous-même, ce serait détourner nos regards de la réalité même qu’il nous faut atteindre ; ce serait nous mettre dans l’impossibilité de rien comprendre au mouvement qui entraîne le monde autour de nous et nous-même avec lui. Je ne crois donc pas obéir à un simple préjugé ni céder à un amour immodéré pour une science que j’ai cultivée toute ma vie, en disant que jamais une culture sociologique n’a été plus nécessaire à l’éducateur. Ce n’est pas que la sociologie puisse nous mettre en main des procédés tout faits et dont il n’y ait plus qu’à se servir. En est-il, d’ailleurs, de cette sorte ? Mais elle peut plus et elle peut mieux. Elle peut nous donner ce dont nous avons le plus instamment besoin, je veux dire un corps d’idées directrices qui soient l’âme de notre pratique et qui la soutiennent, qui donnent un sens à notre action, et qui nous y attachent ; ce qui est la condition nécessaire pour que cette action soit féconde.