Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

politique et l’histoire des institutions politiques. Il serait à souhaiter que nos éducateurs connussent mieux l’histoire de nos institutions scolaires et ne crussent pas, comme il arrive, l’apercevoir à travers Rousseau ou Montaigne.

Puis, Durkheim traite surtout les doctrines comme des faits, et c’est l’éducation de l’esprit historique qu’il entend poursuivre, en les étudiant. C’est tout autrement, d’habitude, qu’on les aborde. Qu’on prenne, par exemple, les livres de Gabriel Compayré, manuels classiques d’histoire de la Pédagogie, familiers à tous nos instituteurs. Malgré leur nom, ce ne sont pas, à proprement parler, des histoires. Sans doute, ils rendent des services. Mais ils rappellent fâcheusement une certaine conception de l’histoire de la philosophie, heureusement désuète. Il semble que les grands pédagogues, un Rabelais, un Montaigne, un Rollin, un Rousseau, y apparaissent comme les collaborateurs du théoricien qui, actuellement, cherche à fixer la doctrine pédagogique. On dirait qu’il y a une vérité pédagogique éternelle, universellement valable, dont ils ont proposé des approximations. Dans leur doctrine, on cherche à séparer l’ivraie et le bon grain, à retenir les préceptes utilisables actuellement pour les maîtres, à rejeter leurs paradoxes et leurs erreurs. La critique dogmatique prend le pas sur l’histoire, l’éloge ou le blâme sur l’explication des idées. Le résidu et le profit intellectuels sont assez minces. Ce n’est pas par la confrontation dialectique des théories du passé, théories plutôt riches d’intuitions confuses que scientifiquement construites, qu’on a chance d’élaborer une doctrine solide et pratiquement féconde. Il arrive communément que les pédagogues de second ordre, éclectiques, modérés et assez platement raisonnables, résistent beaucoup mieux à cette critique que les esprits de premier ordre. La sagesse d’un Rollin s’oppose avec avantage