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OBJET DE LA RECHERCHE

Sociologie religieuse et théorie de la connaissance


I

Nous nous proposons d’étudier dans ce livre la religion la plus primitive et la plus simple qui soit actuellement connue, d’en faire l’analyse et d’en tenter l’explication. Nous disons d’un système religieux qu’il est le plus primitif qu’il nous soit donné d’observer quand il remplit les deux conditions suivantes : en premier lieu, il faut qu’il se rencontre dans des sociétés dont l’organisation n’est dépassée par aucune autre en simplicité[1] ; il faut de plus qu’il soit possible de l’expliquer sans faire intervenir aucun élément emprunté à une religion antérieure.

Ce système, nous nous efforcerons d’en décrire l’économie avec l’exactitude et la fidélité que pourraient y mettre un ethnographe ou un historien. Mais là ne se bornera pas notre tâche. La sociologie se pose d’autres problèmes que l’histoire ou que l’ethnographie. Elle ne cherche pas à connaître les formes périmées de la civilisation dans le seul but de les connaître et de les reconstituer. Mais, comme

  1. Dans le même sens, nous dirons de ces sociétés qu’elles sont primitives et nous appellerons primitif l’homme de ces sociétés. L’expression, sans doute, manque de précision, mais elle est difficilement évitable et, d’ailleurs, quand on a pris soin d’en déterminer la signification elle est sans inconvénients.