elle se plongea chaque jour, dans de longues heures de méditations ; ses vacances se terminaient bientôt.
Devait-elle signifier le congé à M. Burrage ?
Devait-elle décliner l’honneur de recevoir ses visites ? Devait-elle retourner à son emploi, à Montréal, où elle aurait constamment le chagrin d’avoir sous les yeux, cette autre jeune fille qui lui avait ravi tout son bonheur, toutes ses espérances, son Rogers !
Devait-elle consentir à l’invitation de ses parents, de demeurer à Guignes, et de jouir de la tranquillité, du calme et du repos ?
Ninie était toute occupée à résoudre cette question de sa nouvelle orientation lorsque, ne pouvant plus contenir tout le chagrin qui l’accablait, elle tomba, privée de connaissances, la figure baignée de larmes, affaissée sur elle-même, au pied du gros pin ombrageant le jardin de sa mère, et où elle avait pris l’habitude d’aller rêver, écrire ou faire ses lectures ; elle tenait à la main, un crayon et un morceau de papier sur lequel, trois mots étaient écrits seulement, c’était le commencement de sa lettre : Mon cher Rogers,
Sa mère, attirée, par le cri qu’elle poussa, sous la douleur qu’elle ressentit au cœur, la trouva dans un grand état de faiblesse, et parvint à la ramener à sa chambre ; et là, Ninie poussa une triste plainte avec Victor Hugo :
Les champs n’étaient point noirs, les cieux n’étaient point mornes |