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Page:Duval-Thibault - Les deux testaments, 1888.djvu/105

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CHAPITRE IX

M. et Mde Bernier veillaient seuls dans la salle à manger.

M. Bernier lisait des journaux, Mde Bernier tricottait machinalement.

Le tempe était affreux. Une pluie torrentielle inondait la route qu’elle transformait en rivière.

Le vent soufflait avec violence et s’engouffrait dans les cheminées avec des gémissements lugubres.

— Quel temps épouvantable dit enfin M. Bernier.

Mde Bernier, ne répondit pas, absorbée qu’elle semblait être par ses réflexions. Il était bien possible qu’elle n’eut pas entendu la remarque de son mari.

Après quelques instants de silence, celui ci reprit :

— Ce n’est pas moi qui voudrait être dehors par un temps pareil.

Cette fois Mde Bernier leva les yeux d’un air interrogatif.

Encouragé par ce signe d’attention, M. Bernier se mit à dire :

— J’aimerais bien à savoir ce que fait notre Marie Louise en ce moment.

Il savait par expérience que ce sujet était le seul qui put rendre sa femme un peu communicative.

— Elle s’amuse sans doute, dit-elle, tranquillement.

— C’est que je commence à m’en ennuyer. La maison semble bien grande et bien vide sans elle.

— C’est vrai. Je me dis cela tous les jours.

— Ne trouves-tu pas qu’il serait temps de la faire revenir ? Nous voilà rendus au 15 de mai. On dit que la chaleur commence de bonne heure à New York. Marie Louise qui est accoutumée à l’air pur d’ici pourrait s’en trouver incommodée.

— Vous avez peut être raison. Nous ferons sans doute mieux de la faire revenir.

— Elle pourra très bien revenir seule jusqu’à Montréal, et arrivée là j’y serai pour l’attendre et la ramener ici.

— Il faudrait lui écrire sans tarder, alors, afin qu’elle ait le temps de se préparer pour le voyage.

Là dessus, Mde Bernier retomba dans le silence.

Cela ne satisfaisait pas son mari. L’impatience que lui causait la froi-