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Page:Duval-Thibault - Les deux testaments, 1888.djvu/144

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LES DEUX TESTAMENTS

elle, pour y passer une partie de la journée.

Dans l’après-midi, elle retournait à la maison pour veiller aux préparatifs du souper, et surveiller un peu ses jeunes frères, quand ceux ci revenaient de l’école.

Un jour qu’il pleuvait et que Pti-Fonce, le plus jeune était resté à la maison, il se glissa dans la chambre de sa mère et y demeura longtemps, sans faire de bruit, ce qui était de mauvaise augure.

Quand on n’entendait pas ce gamin turbulent, on pouvait être certain qu’il était en train d’examiner la mécanisme d’une montre ou d’une pendule, qu’il dessinait avec un morceau de charbon sur les murs propres et blancs ; qu’il faisait des recherches dans les tiroirs de commode, ou bien encore, qu’il mangeait le contenu des pots de confitures, laissés par malheur à sa portée.

Ses plus grands méfaits s’étaient toujours accomplis dans un silence parfait.

Emma qui connaissait bien cette particularité de son petit frère s’alarma de son séjour prolongé dans la chambre de sa mère.

— Il doit être en train de faire quelque mauvais coup, se dit elle, et sans plus tarder, elle se dirigea vers la chambre sans faire de bruit pour le surprendre.

Le gamin était assis par terre et tenait en mains un petit coffret à serrure qu’il avait réussi à ouvrir d’une manière ou d’une autre et duquel il était occupé à tirer des lettres, des papiers et quelques vieilles photographies.

— Vilain enfant ! s’écria Emma indignée, et prenant le gamin par l’oreille, elle le força de se lever et de quitter la chambre, ce qu’il fit de mauvaise grâce et en pleurnichant tant soit peu.

Ce coffret était considéré presque comme une relique par Mde Bonneville, car il avait appartenu ainsi que son contenu, à son défunt père. A ce titre, elle l’avait toujours conservé précieusement dans un des tiroirs de sa commode, mais jamais l’idée de l’ouvrir et d’en examiner le contenu lui était venue, d’autant plus qu’elle ne lisait que très peu l’écriture. Mais elle savait que ce meuble contenait des papiers et lettres, ayant appartenu à son père, et elle l’avait dit à sa fille quand celle ci l’avait un jour questionnée à ce sujet.

Emma s’agenouilla par terre pour ramasser les papiers qu’elle commença à remettre dans le coffret tout en les examinant tour à tour.