Renaud dit qu’il l’a toujours été, mais je sais mieux que cela, moi. C’est le chagrin qui la rendu comme ça, j’en suis certain.
Mais vous allez dire que je suis un vieux bavard, monsieur.
— Pas du tout. Ce que vous me racontez là est bien intéressant, au contraire.
— Je m’intéressais à ce jeune homme-là, continua le bonhomme. Il avait l’air si franc et si bon, et son visage était si radieux quand il arrivait à la porte de M. Renaud, le dimanche après midi.
La conversation ayant continué sur ce ton quelques temps, Charles LeCompte se retira, tout heureux de sa découverte, car il sentait que cette circonstance aurait plus de poids, auprès de la veuve, que tous ses plus solides raisonnements.
Il se rendit donc chez elle sans plus tarder, et lui apprit la nouvelle avec une gravité de circonstance.
Il ne s’était pas trompé dans son attente. En apprenant que son gendre songeait à se remarier, et qu’il était même fiancé avec une jeune fille, elle entra dans une grande colère et résolut de refaire son testament immédiatement.
Profitant de ses bonnes dispositions, son ami s’occupa de trouver un bon notaire, à qui il expliqua les circonstances, et qu’il amena un beau jour en triomphe chez la veuve.
Deux heures après, le notaire sortit, et le bon vieillard qui le reconduisait à la porte, se disait en lui-même :
— Te voilà vaincu, mon bon M. Bernier !