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D’UNE COCODETTE


montrait ainsi démonstrative et plus que tendre[1], on pouvait être sûr qu’elle prenait ses précautions pour obtenir une chose qui coûtait au brave homme.

Cette fois, c’était moi qui devais payer les frais des tendresses maternelles. Voici comment.

Conseillée vraisemblablement par M. Gobert, qui se donnait pour un homme habile, ma mère, qui pouvait croire à une intention préméditée de ma part d’espionner ses actions, de la gêner même, peut-être, — redoutant[2] sans doute aussi d’être exposée à rougir devant moi, — ma mère donc, pour vivre à sa guise, forma le dessein de se débarrasser de moi, de me faire sortir de la maison.

Mais la chose n’était pas facile. À seize ans, quoique toute formée, je ne pouvais encore être

    possible, elle s’est vue. — Cette fille l’observe, elle l’étudie, elle la devine, elle la juge. C’est sa propre enfant, le sang de son sang. Un autre jour, avec la brutalité d’un gendarme qui saisit un voleur la main dans la poche d’un passant, elle la prend sur le fait, dans l’action de l’adultère même, « en flagrant délit, » comme on dit.
     Voilà une expiation qui n’a jamais été prévue ni par la société, ni par le Code, et qui me semble autrement terrible que le coup de pistolet d’un mari.

  1. Variante, ligne 1, après tendre ; lire : avec lui.
  2. — ligne 11, au lieu de redoutant ; lire : elle redoutait.
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