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LIVRE IX.

l’écriture carrée, massive de Turpin, qui n’avait pas manqué d’ajouter sur les deux bords deux sceaux de cire rouge.

Sitôt que cette nouvelle fut répandue, toutes les villes entrèrent dans une fermentation extraordinaire. Il fallut que le bon Merlin, assisté de son scribe, se transportât de lieux en lieux ; et ceux-là étaient désespérés, qui ne pouvaient obtenir quelques lignes de l’écriture de Turpin. Tout le parchemin des Gaules s’y usa promptement. Mais l’on comprit alors pourquoi le sage Merlin s’était détourné de son chemin, pourquoi il était allé lui-même au-devant de l’embuscade, et pourquoi il avait dit à l’ermite : « Viens, suis-moi, et n’oublie pas ton écritoire. »

II

Si j’avais vingt langues dans ma bouche et vingt scribes autour de moi (tels que le siècle en possède quelques-uns), j’aurais peine à raconter tout ce que fit Merlin en parcourant la France. Une aventure marquera la sagesse qu’il montrait chaque jour. Plus il pénétrait dans le pays, plus il se reprochait amèrement d’avoir négligé les provinces.

« Hélas ! mon ami, j’en rougis, disait-il à Turpin. Comment ai-je pu les oublier si bien, qu’elles en sont presque nues ? J’ai tout fait pour Paris, et Paris m’ou-