Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur, 1860.djvu/319

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
307
LIVRE IX.

têtes des pennons à la langue de feu. Chacun rayonnait, sous son dais cramoisi, comme un soleil joyeux dans l’une de ses douze maisons du zodiaque.

« Attendrons-nous longtemps encore ? dit Arthus. Français, j’ai soif !

— Les voici, beau sire, a répondu le sénéchal. Le long chemin les a retardés. »

Voyant les convives étrangers arriver à la file du bout de la terre, Arthus se leva. Il fit trois pas au-devant d’eux, pour leur faire fête. Ceux-ci, mettant pied à terre, Allemands, Saxons, Grecs d’outre-mer et de Cappadoce, et des ports d’Espagne, Sarrasins de Gor et d’Arménie, Nègres de Nubie, hommes d’Albanie et de Kent, lui baisèrent les mains, saluant en lui le roi des rois. Pour les honorer, grailles et trompes sonnèrent et buccines d’airain. Jacques emmena par la bride leurs chevaux essoufflés vers des auges de marbre remplies jusqu’au bord d’orge et d’avoine. Il en ferra plus d’un. À tous il ôta le frein et les selles dorées.

Cependant Merlin, au gracieux visage, conduisait par la main ses convives et les rangeait, non par ordre de blason, mais à sa fantaisie. Chacun s’en trouvait bien. Comme un bon joailler mêle dans un collier les perles aux améthystes, les émeraudes aux turquoises, il mêla d’abord ceux qui venaient du Nord et ceux qui venaient du Midi. Après cela il joignit ses hôtes du Levant à ceux du Ponent.

Il fit asseoir le pâle Siegfrid, au heaume encore écartelé, à la droite d’Arthus ; Rustem, le shah de Perse, à