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Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur, 1860.djvu/451

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LIVRE XII.

parmi ces décombres, lui tenir lieu de tout ce qu’elle avait perdu, lui bâtir de ses mains une cabane qui lui ferait oublier l’ancien palais détruit, l’épouser à la face des dieux, ces idées, mille autres plus étranges, traversèrent sa pensée. Mais la sagesse l’emporta sur cette surprise du cœur ; il était redevenu maître au moins de son visage, lorsqu’il se trouva auprès d’elle.

Il venait de fouler et d’écraser sous ses pieds de petits coquillages incrustés dans le sable. Ce faible bruit éveille Psyché de son rêve. Elle tourne la tête et pousse un cri.

« Connais-tu celui que je cherche ?

— Comme toi, ô Psyché !

— Es-tu de sa légion ?

— J’en suis le chef.

— L’as-tu vu ?

— Mille fois.

— De tes yeux ?

— Oui, à travers mes larmes.

— Que faisait-il ?

— Tout et rien à la fois, un monde dans un soupir.

— À ce signe je le reconnais. Est-il encore aveugle ?

— Toujours ; et pourtant il voit ce qui est impénétrable à tous les autres.

— T’a-t-il parlé de moi ?

— Il n’ose.

— Que t’a-t-il dit ?

— Il se tait, il pâlit et il pleure.

— Lui, pâlir et pleurer sans oser dire pourquoi !