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MERLIN L’ENCHANTEUR.

Les deux rois et Merlin s’assirent à fond de cale. Le petit esquif sorti de l’anse, rasa les flots avec la rapidité de la procellaria.

Il ne s’arrêta que pour s’échouer dans un port d’Orient, entre Russicada et le mont Azara.

Depuis longtemps le roi du désert ne songeait qu’à rendre Merlin favorable aux vastes contrées brûlées du soleil, sur lesquelles s’étendait son empire.

« Ne soyez point injuste envers mon royaume, lui dit-il, au moment de prendre terre. Si je ne puis vous offrir les mêmes fêtes que le roi Épistrophius (car, excepté le djérib, les jeux sont ici en médiocre honneur), il me sera peut-être, permis de vous intéresser à d’autres spectacles. »

Et, voulant tout d’abord frapper son esprit par une grande impression, il ajouta :

« Connaissez-vous, Merlin, le prêtre Jean ?

— Le prêtre Jean ! s’écria notre héros, en s’élançant hors du caïque, la merveille de l’Orient ! l’enchanteur du pays où se lève le soleil ! la perle des hommes de notre art ! mon maître, si je pouvais en avoir !

— Vous l’avez dit, repartit le roi. Il habite dans mes États ; j’ai fait vœu d’aller en pèlerinage auprès de lui, avant de dormir même sous un toit de roseau.

— Le prêtre Jean ! répétait encore Merlin. J’eusse fait le voyage uniquement pour entendre parler de lui.

— Si vous ne craignez le scandale, je puis vous le montrer.