Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur tome 2, 1860.djvu/76

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
72
MERLIN L’ENCHANTEUR.

mots, en dépit d’eux, avaient un sens dans leurs bouches. Aussi les concurrents, pleins de honte, durent se retirer au milieu des huées de la foule.

La journée, déjà fort avancée, se termina par la lecture solennelle qu’Hélicanus, seigneur de Tyr, fit de la grande histoire qu’il avait composée des dynasties des ruines. Depuis Hérodote, c’était la première fois, peut-être, que la Grèce assistait à une semblable fête de la parole. Tous se pressèrent autour de l’historien. Il s’assit sur l’herbe fanée, et, tenant sur ses genoux le vaste volume, il commença ainsi :

« En ce temps-là les orties et les ronces commencèrent à pousser naturellement dans l’enceinte des temples ; les chardons se répandirent sur la face des royaumes, et ce fut une allégresse universelle.

« L’année suivante il y eut beaucoup de roseaux dans l’empire de Micipsa, et cette prospérité emplit de joie le cœur de chacun.

« L’année qui suivit fut plus favorable encore. Les murailles des villes s’écroulèrent avec un bruit harmonieux.

« Après cela nouveaux progrès, dont tous les gens de bien se réjouirent. À la place des hommes, les renards s’établirent dans Sparte. Le duc de Crète en fit, dans la citadelle, une chasse considérable, dont les vieillards se souviennent encore.

« Enfin, la civilisation fut portée à son comble. Les vautours nichèrent à Corinthe, à Sicyone. Sagremor, roi de Byzance, nourrit, dans les combles du Parthénon,