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remua ses lèvres, et elle se laissa tomber, dans l’ombre d’en dessous, avec un frôlement de soie, un cliquetis de bijoux. Un choc mat, un clapotis lointain : l’eau noire, le monstre, léchait les parois gluantes… Puis, tout se tut.

Taalith, parée en épousée, avait disparu. Tous l’accusèrent de s’être enfuie pour aller se prostituer dans les bouges de la Casbah.

Mais Zouïna, hagarde, vieillie, devina la vérité et supplia qu’on la descendît dans le puits au bout d’une corde. Devant cette incessante prière qui semblait de la folie, l’autorité fit murer le puits. Alors, Zouïna s’arracha les ongles et la chair des mains contre la pierre, hurlant pendant des jours le nom chéri : Taalith !

On chercha au dehors, en vain. Alors, on rouvrit le gouffre, un homme descendit, trouva Taalith qui flottait…

On ramena le cadavre sur les dalles blanches, et le soleil discret du soir ralluma des lueurs roses sur les bijoux enserrant encore les chairs boursouflées, verdâtres, toute l’immonde pourriture qui avait été Taalith…