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homme se lève, jeune, grand, robuste, fièrement drapé dans son burnous dont la propreté blanche contraste avec le ton terreux des autres… Son visage plus régulier, plus beau, d’homme du sud est bronzé, tanné par le soleil et le vent. Ses yeux, longs et très noirs, brillent d’un singulier éclat sous ses sourcils bien arqués.

De sa main effilée d’oisif, il impose silence.

C’est El Hadj Abdelkader, le meddah[1]. Il va chanter et tous les autres, à genoux sur les banquettes, se penchent sur les cloisons pour l’écouter.

Alors, tout doucement, en sourdine, les djouak et les gasba commencent à distiller une tristesse lente, douce, infinie, tandis que, discrètement encore, les benadir battent la mesure monotone.

Les roseaux magiques se taisent et le meddah commence, sur un air étrange, une mélopée sur le sultan des saints, Sidi Abdelkader Djilani de Bagdad.

Guéris-moi, ô Djilani, flambeau des ténèbres !

Guéris-moi, ô la meilleure des créatures !

Mon cœur est en proie à la crainte.

Mais je fais de toi mon rempart.

Sa voix, rapide sur les premiers mots de

  1. Rhapsode arabe.