Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t1, trad. Délerot.djvu/446

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alors ; mais pour cette vieille terre, elle tient bon, et l’air, l’eau, le sol, tout cela est resté comme autrefois ! — Tout à l’heure, retournez donc chez Schrœn, et faites-vous montrer la mansarde que Schiller a habitée. »

Le déjeuner, dans cet air pur et à cette heureuse place, nous parut excellent ; Schiller était avec nous, du moins dans notre esprit, et Goethe rappela encore avec bonheur maint bon souvenir de lui.

Je montai plus tard avec Schrœn dans la mansarde de Schiller ; on avait des fenêtres une vue splendide. Vers le sud, on apercevait plusieurs lieues du beau cours de la Saale qui se perd de temps en temps dans des bouquets de bois. L’horizon était immense ; c’était un endroit excellent pour observer la marche des constellations et on se disait qu’il n’y en avait pas de meilleur pour composer tous les passages astronomiques et astrologiques du Wallenstein.

Je descendis et j’allai avec Goethe chez M. le conseiller aulique Dœbereiner, que Goethe estime beaucoup et qui nous fit quelques expériences de chimie. Midi arriva. Nous remontâmes en voiture. « N’allons pas dîner à l’hôtel, me dit Goethe ; jouissons de cette belle journée en plein air. Allons à Burgau. Nous avons du vin dans la voiture, nous trouverons toujours là-bas un bon poisson au bleu ou bien frit. » Nous fîmes comme Goethe disait, et ce fut vraiment délicieux. Nous remontâmes la Saale, suivant le chemin charmant que j’avais découvert de la mansarde de Schiller. Bientôt arrivés à Burgau, nous descendîmes à l’auberge située sur le bord de la rivière, près du pont conduisant à Lobeda, que l’on a au loin devant soi, de l’autre côté des champs. Tout se passa à l’auberge comme Goethe l’avait prévu. L’hôtesse s’ex-