Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t2, trad. Délerot.djvu/324

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ne doivent jamais être choisis par l’artiste pour ce but. » « Un paysagiste, continua Goethe, doit avoir un très-grand nombre de connaissances. Ce n’est pas assez qu’il entende la perspective, l’architecture, l’anatomie de l’homme et des animaux, il doit aussi posséder des notions en botanique et en minéralogie. En botanique, pour qu’il sache rendre le caractère exact des arbres et des plantes ; en minéralogie, pour qu’il sache rendre le caractère exact des diverses espèces de montagnes. Il n’a pas besoin d’être minéralogiste complet, il n’a affaire qu’à des montagnes de calcaires, d’argile schisteuse, de grès, et il a seulement besoin de savoir quelles sont leurs formes distinctives, de quelle manière elles se décomposent, et quelles espèces d’arbres prospèrent ou végètent sur chacune d’elles. »

En me montrant des paysages de Hermann de Schwanefeld, il me dit : « Chez ce peintre plus que chez tout autre, l’art est un goût et le goût un art. Il ressent un amour profond pour la nature, et il y a en lui une paix divine qui se communique à nous quand nous contemplons ses œuvres. Il est né en Hollande, mais il a étudié à Rome, sous Claude Lorrain, et il doit à son maître son libre et parfait développement. »

Nous cherchâmes dans un dictionnaire artistique pour voir ce que l’on disait de Hermann de Schwanefeld ; on lui reprochait d’être resté au-dessous de son maître. — « Les fous ! dit Goethe. Schwanefeld était autre que Claude Lorrain et celui-ci par conséquent ne peut pas être considéré comme ayant eu plus de valeur. Si on ne disait de nous rien de plus que ce que racontent les biographes et les faiseurs de dictionnaires, ce serait un pauvre métier que la vie, et qui ne vaudrait pas la fatigue qu’il donne ! »