Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t2, trad. Délerot.djvu/347

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gâté ce que la nature a créé si beau. » — En échange, il avait l’intention d’envoyer une épreuve de son portrait lithographié par Stieler ; et il dit qu’il avait déjà composé quatre vers, qu’il écrirait sur l’épreuve aussitôt après son rétablissement. — Le soir, il demanda la liste des personnes qui étaient venues savoir de ses nouvelles, et après l’avoir lue, il dit qu’il n’oublierait pas, après sa guérison, cette preuve d’intérêt. Déjà dans la journée il avait exprimé le regret de ne pouvoir recevoir ses amis. Il obligea tout le monde à aller se reposer, et il fit coucher sur le lit, à côté de lui, son domestique, épuisé par les veilles continues. Il dit plusieurs fois à son copiste Jean, qui était près de lui pendant la nuit : « Soyez-moi fidèle et restez chez moi, cela ne peut durer que quelques jours. »

Le lendemain matin, il dit encore à sa belle-fille Ottilie : « Avril amène avec lui plus d’une belle journée ; l’exercice en plein air me rendra mes forces. » — Il fit quelques pas vers son cabinet de travail, mais il fut obligé de se rasseoir aussitôt ; plus tard il voulut se lever de nouveau, il retombait dans son fauteuil. L’entrée de sa chambre était absolument interdite, même au grand-duc ; il n’y avait avec lui que sa belle-fille, ses petits-enfants Wolf et Walter, le médecin et son domestique. Le nom d’Ottilie revenait souvent sur ses lèvres ; il la pria de s’asseoir auprès de lui et tint longtemps sa main dans les siennes. De douces images traversaient de temps en temps son imagination. — Dans un de ses rêves il dit : « Voyez… voyez cette belle tête de femme… avec ses boucles noires un coloris splendide… sur un fond noir » — À un autre moment, voyant sur le sol une feuille de papier, il demanda : « Pourquoi laisse-t-on par terre une lettre de Schiller ?… Il faut la