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chez elle. Une heure après, serrés l’un contre l’autre dans leur lit, Edgard et Éléonore, tout à leurs amours, avaient complètement oublié les époux Couillard.

ii

les graves conséquences d’un tour de cochon


Si Edgard et Éléonore ne pensaient plus aux époux Couillard, ceux-ci, par contre, ne les oubliaient pas.

Le jeune attaché s’en aperçut lorsque le lendemain, vers onze heures du matin, le ministre le fit appeler.

Le ministre de l’Intérieur n’était pas seul, son collègue Durand, de l’Économie nationale, se tenait auprès de lui.

Dès qu’il eut franchi le seuil du cabinet ministériel, Edgard comprit que les choses n’allaient pas s’arranger facilement.

Le ministre — celui auquel il était attaché — faisait tous ses efforts pour prendre un air solennel :

— Eh bien ! Monsieur Dumoulin. Vous en faites de belles ! Vous causez des scandales publics… Vous traînez dans les établissements de nuit avec des filles… Et la police est obligée de vous ramasser à demi-ivre dans la rue, insultant les personnes les plus honorables…

— Permettez, monsieur le ministre, permettez que je vous explique.

— Vos explications seraient superflues, votre cas est grave, très grave… M. Durand, ici présent, exige une sanction.

— Oui, monsieur, je l’exige, affirma le second ministre en regardant le malheureux Edgard, car vous vous êtes conduit d’une façon indigne à l’égard d’une parente qui m’est chère.

— Je sais, monsieur le ministre. Mais pouvais-je supposer que Mme Couillard était votre tante ? Je suis prêt à lui faire toutes les excuses qu’elle désirera.

— Elle ne veut pas d’excuses. Elle veut une sanction.

— Je ne dis pas. Mais vous même, monsieur le ministre, ne pouvez pas être aussi intransigeant.

— Hé ! monsieur… Je comprends naturellement, je comprends. Mais, ma tante, elle ne comprendra pas. Et je suis député de Loire-et-Garonne, moi, monsieur… Et le conseil général de ce département est présidé par ma tante.

— Par votre oncle, voulez-vous dire.

— Par mon oncle si vous préférez. Mais mon oncle ne fait que ce que ma tante lui ordonne.