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Edgard était étonné de se voir ainsi deviné par la malicieuse concierge.

— Bigre ! pensa-t-il, celle-ci est rouée comme tout. Il vaut mieux jouer franc jeu avec elle.

Puis, s’adressant à Joséphine :

— En tous cas, gardez bien votre langue, même à l’égard d’Adrien, n’est-ce pas ? Vous avez tout intérêt à ne pas parler, d’abord à cause de votre mari et ensuite parce que vous serez largement récompensée.

« Voici déjà un petit acompte pour vous dédommager de votre peine.

Et, sortant son portefeuille, Edgard en tira deux billets de cent francs qu’il tendit à l’amie du jeune Adrien.

Celle-ci s’en empara tandis qu’un sourire illuminait son visage :

— Oh ! monsieur le sous-préfet n’a rien à craindre. Monsieur le sous-préfet peut disposer de moi comme il lui plaira.

— C’est bien ce que je compte faire. Et surtout pas un mot, ni à Adrien, ni non plus à la dame à laquelle il ouvre la porte tous les soirs.

Quand le soir vint, tout se passa comme il était convenu.

Edgard ne quitta Agénor que lorsque celui-ci fut bien endormi.

Le sous-préfet pénétra ensuite dans ses appartements et il trouva, comme chaque nuit, la belle Éléonore dans son propre lit, plus énamourée que jamais.

Edgard se garda bien de raconter à son amie quoi que ce fut des événements de la journée. Pourtant Éléonore le questionna comme si elle avait eu vent de quelque chose.

— Tu ne redoutes rien de la comtesse ? lui dit-elle.

— Pourquoi me demandes-tu cela ? Je ne redoute rien du tout. As-tu appris du nouveau ?

— Non, mais des fois, on ne sait pas. Tu as tant peur d’elle.

— Pour le moment, je crois qu’elle ne se préoccupe pas de moi.

— Ah !

— On m’a même assuré qu’elle allait quitter Château-du-Lac pour faire une nouvelle retraite dans son couvent.

— Vraiment ? Alors, tu seras bien tranquille.

Était-ce à cause des incidents de la journée, qui avaient tout de même énervé Edgard ? Toujours est-il qu’il lui sembla que son amie avait prononcé cette dernière phrase d’un petit ton moqueur.

Mais il oublia vite cette impression sous les caresses de sa maîtresse.