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Prise au piège.


Ce soir-là, lorsque Edgard vint dans sa chambre pour retrouver Éléonore, laquelle, comme chaque jour, était déjà couchée dans le lit du sous-préfet, ce dernier était encore entièrement vêtu.

— Eh bien ! lui dit Éléonore. Tu ne te déshabille pas aujourd’hui ?

— Non.

— Comment cela. Non !… Tu as encore du monde ?

— Pas du tout. Mais j’ai un travail urgent à finir. Je ne me coucherai que dans une heure ou deux. Repose-toi en m’attendant.

— Ça, ce n’est pas gentil. Tu vas me laisser toute seule.

— Voyons, grande bête, puisqu’il faut que je finisse un rapport pour le préfet.

— Oh ! Ce préfet ! En voilà un que je maudis !

— Pourquoi donc ?

— Dame ! Sans lui, sans son idée stupide de venir à Château-du-Lac, nous filerions tous les deux sur Paris.

— Ah oui ! Bien sûr ! bien sûr !…

Si Éléonore n’avait pas eu l’esprit ailleurs, elle eut certainement remarqué combien ce « Bien sûr » manquait de conviction.

Mais Éléonore, ce soir-là, avait sans doute d’autres préoccupations.

Elle dit seulement à son amant :

— Dépêche-toi de finir ce rapport pour venir me retrouver le plus tôt possible…

Et ils échangèrent un baiser… mais un baiser qui sonnait faux, si l’on peut dire.

Or, Edgard, comme bien l’on pense, n’avait aucun rapport à rédiger pour le préfet. Il passa dans son cabinet de travail, s’assit dans un fauteuil et ouvrit un livre.

Vraisemblablement il attendait quelqu’un ou quelque chose.

Disons tout de suite qu’il attendait l’heure d’agir.

Lorsque la pendule marqua une heure du matin, il se dirigea vers la fenêtre et explora la rue du regard…

Il fut sans doute satisfait de son examen, car il se frotta les mains en disant :

— Tout va bien !… Le docteur est là !