Page:Edmond Mandey Coeurs en folie, 1924.djvu/35

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
— 27 —

Comme il avait été convenu, entre elles elles avaient changé de chambres.

À peine l’hôtelière avait-elle pris congé de son mari et de Me Robert qu’elle appelait sa servante :

— Maître Honoré ne se doute de rien ? lui demanda-t-elle.

— Oh non ! Madame ! J’ai fait exprès l’aimable toute la soirée.

— Il t’a parlé encore ?

— Oui… une fois, il m’a glissé un mot : « À cette nuit. »

— Et que lui as-tu répondu ?… Tu ne l’as pas éconduit au moins.

— Oh non ! Pensez-vous. Au contraire, je lui ai dit : « Oui, à cette nuit. » Il était joyeux comme tout et il a de nouveau essayé de m’embrasser.

— Oh ! C’est un dégoûtant personnage !

— Mais je ne me suis pas laissé faire.

— Je l’espère bien. Enfin, il compte que tu l’attendras dans ta chambre ?

— Dame, oui.

— Alors, nous allons tout de suite faire l’échange. Tu vas te coucher ici et je vais monter chez toi… Donne-moi la clé de ta chambre. Pour le reste, tu n’as pas besoin de bouger.

— Et si Monsieur venait…

— Venir, lui !… Il n’y a pas de danger… Il est attablé avec le notaire et ils resteront ensemble jusqu’à minuit, tu peux en être certaine.

— Des fois, pour s’assurer que vous dormez.

— Dans ce cas, tu n’aurais qu’à rester coite, et faire semblant d’être plongée dans le plus grand sommeil.

— Vous pouvez être tranquille et compter sur moi. Si par hasard, il vient, je me pelotonne sous les draps et il sera convaincu que je dors profondément.

Mme Jeanne ne quitta sa chambre que lorsque la servante eût pris sa place dans le lit. Je crois même qu’elle poussa la solliciture jusqu’à la border bien convenablement, et, en faisant attention à ne pas être remarquée, elle gravit l’escalier qui conduisait à l’étage où couchait habituellement Adèle.

Elle se coucha à son tour, éteignit la lumière et attendit les événements, ou plutôt l’événement.

Elle riait sous cape, se disant :