Page:Edmond Mandey Coeurs en folie, 1924.djvu/46

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notaire, assis sur le lit, et qui la regardait en souriant tranquillement.

L’étonnement empêchait la femme de parler. Pourtant, elle laissa échapper quelques mots révélant sa stupéfaction :

— Vous !… Vous !…

— Oui, chère amie, moi… moi qui vous aimais trop, qui n’ai pu résister à ma passion.

Mais elle l’interrompit, riant moqueusement :

— Ne dites donc pas de bêtises ! Vous êtes comme les autres. Ce n’est pas moi que vous veniez retrouver dans cette chambre. C’est la bonne… La bonne !… Ils sont tous amoureux de la bonne…

Et elle s’assit la tête dans les mains, essayant de pleurer…

Alors il s’approcha, la prit doucement par les poignets et l’attirant vers lui, l’embrassa sur le front et sur les yeux, disant :

— Non, Jeanne chérie… Ce n’est pas la bonne, c’est bien toi que je suis venu retrouver ici. Écoute, je sais que tu as changé de chambre avec Adèle parce que ton mari devait venir cette nuit voir ta servante.

« J’ai fait boire Honoré pour qu’il ne monte pas et je suis venu prendre sa place comme tu avais pris celle de ta servante…

— C’est vrai ?… C’est bien vrai ?

— C’est la vérité. Comment je sais ce que je viens de te dire ? Je vous ai entendues, ce soir, Adèle et toi…

Là, le notaire mentait. Nous savons, nous, par suite de quel concours de circonstances, il avait été informé de ce qui s’était passé entre les deux femmes, mais on reconnaîtra qu’il était bien obligé de travestir quelque peu la vérité, pour ne pas avouer à sa maîtresse ce qui s’était passé entre lui et Adèle.

Car il pouvait à présent appeler Jeanne sa maîtresse.

La jeune femme, d’ailleurs, ne demandait qu’à le croire.

Elle ne demandait qu’à le croire et à lui pardonner, car elle avait été trop heureuse l’instant d’avant. Et elle comprenait maintenant pourquoi elle avait ressenti des impressions que son mari ne lui avait jamais fait éprouver.

Aussi, comme Robert lui disait, de nouveau :

— Tu me pardonnes !

Elle répondit, en soupirant :

Il faut bien.