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histoire de l'abbaye des écharlis

Marin Vallet, notaire de l’abbaye, Jacques G., lieutenant des Écharlis. L’un d’eux demande aux guerriers pourquoi ils forcent le monastère. En guise de réponse, les cavaliers « lancent une bordée de blasphèmes contre le saint nom de Dieu » et tirent plusieurs coups de fusil sur les habitants qui se retirent aussitôt dans les bâtiments. « Rompant la grande porte. », ils passent ensuite dans la grande cour. Comme la porte du parloir est fermée, ils y mettent le feu avec des bottes de paille prises dans la métairie. Ils mettent également le feu dans une grande salle qui est située près de cette porte, renferme « quantité de bois de corde » et est brûlée en un instant, puis, dans la salle des novices qui contient cinq ou six mille fagots et plusieurs coffres appartenant au prieur. Sous l’effet de la chaleur, la voûte s’effondre ; le feu consume alors les bâtiments joints à cette salle, le dortoir des religieux, une partie de l’église et des cloîtres. Tandis qu’à l’aide de cordes, quelques religieux parviennent à se sauver par derrière et vont à Chevillon retrouver le prieur, les soldats contournent l’abbaye, arrivent « aux offices, lingeries et locaux destinés aux religieux » ; ils y trouvent des moines avec un grand nombre de personnes qui y ont déposé ce qu’elles ont de plus cher. Ils prennent ce qui leur convient et font brûler tout le reste. On craint même un moment que les religieux et les gens ne soient égorgés par ces vandales ou consumés par les flammes. De fait, malgré les héroïques efforts des moines, trois femmes et cinq enfants sont atrocement brûlés. La lueur causée par l’incendie se voit de si loin que plusieurs personnes accourent de Chevillon et de Cudot.

Pendant que le feu accomplit son œuvre, les cavaliers se tiennent près des murailles. Leur chef dit qu’ils ne feront plus de mal si on leur donne du pain, du vin et de l’avoine. On les fait entrer dans les bâtiments épargnés par le fléau et on leur donne ce qu’ils demandent. À peine sont-ils rassasiés qu’ils s’emparent de harnais, grains, vins, du contenu de saloirs et d’autres meubles, et mettent encore le feu dans la salle où ils ont été reçus. Puis, ce dernier forfait accompli, ils s’en vont, emmenant les chevaux du monastère et tout leur butin. C’est un désastre complet !

Quelques mois après, l’abbé Roger de Harlay le fait constater par une enquête juridique. Le 20 juillet 1052, Maximilien Gaultier, seigneur de la Borgniote, lieutenant général civil et criminel du bailli de Sens, assisté de Louis Sollé, greffier