Page:Eekhoud - Kermesses, 1884.djvu/175

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sûr. Pareil prodige annonce au moins la venue de l’Antechrist. Voyons, ami Tybout, reprenez vos sens ou rendez-moi les miens. L’un de nous rêve en ce moment. Et vous, Siska, mon enfant, connaissez-vous le cadet qui vous courtise ?

— Nous sommes d’accord, Monsieur le curé. Pas vrai, Siska ? fit Mark sans se laisser démonter.

La Siska rougissante répondit par un faible oui…

— Eh bien, reprit le curé, dans ce cas, nous aviserons. Inutile pourtant de précipiter les affaires. Revenez me voir tous deux dans huit jours.

Une semaine se passa. Le terme arrivé, nouveau coup de sonnette au presbytère, nouvelle entrée de Marcus Tybout, endimanché et presque solennel, poussant devant lui une jeune fille gauche et confuse.

— Mais, s’exclama le curé en dévisageant la belle, que signifie ceci, garçon ? Je n’ai pas la berlue que je sache et cependant je reconnais, ici présente, Mietje Purss, la nièce de boer Nagels, alors que l’autre fois vous m’aviez amené Siska Simons ?

— J’ai réfléchi, Monsieur le curé. Décidément celle-ci me botterait mieux. El si vous vouliez publier nos bans…

Le pasteur faillit se fâcher, car tout cela ressemblait furieusement à la gageure d’un plaisantin sans vergogne, mais en scrutant la physionomie du menuisier, il y trouva un air si franc et si candide que la colère fit place chez le digne prêtre à un conciliant éclat de rire.

— Écoutez, mon fils, dit-il à Mark en reprenant difficilement son sérieux, comme vous vous êtes bien trouvé de mon conseil lors de votre première visite,