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Page:Eekhoud - Les Pittoresques, 1879.djvu/113

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Raymonne


« Parfois, au fond du bois, armé de la cognée,
Je reste un jour entier. Je te sais éloignée
Par le corps, mais mon âme est toujours près de toi.
Qu’importent la distance et la fatigue et l’heure,
Si la meilleure part de mon être demeure
Ici, dans cette manse, où tu reçus ma foi ! »

Ainsi, murmure-t-il d’une voix douce et tendre,
Contre laquelle un cœur ne pourrait se défendre :
C’est un soupir mêlé de désir et d’espoir…
Raymonne a tressailli. Sur Huguet elle lève
Des yeux bleus qu’on ne voit si limpides qu’en rêve,
Et dit : « Tu ne sais pas comme j’attends le soir.

Tu ne sais pas comment, anxieuse, j’écoute
Ton pas que je connais résonner sur la route…
Comment, lorsqu’il s’éloigne au matin, je me sens
Perdre de ma gaîté, comme si la distance
Qui se met entre nous minait mon existence,
Jetait un voile noir et lourd sur tous mes sens.

« Mais au retour, aussi, comme mon cœur s’éveille !
Comme, lorsque ta voix caresse mon oreille,
Tout renaît à mes yeux ! Si je n’ose parler