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LES FUSILLÉS DE MALINES

comme des caresses. Les muqueuses distillaient le dictame de mystiques et sapides baisers.

Repus de la chair d’un Dieu, il tardait à ces béats de se mêler, au dehors, pour se congratuler et s’étreindre fraternellement. Le flux des arrivants jalousait le reflux des partants et en frôlant leurs camarades, les premiers ressentaient le choc en retour du coup de foudre eucharistique.

Ce n’étaient que bras musclés, épaules carrées, piliers charnus, croupes renforcées sur lesquelles bridaient des houzeaux brunâtres et luisants comme un labour : complexions blondes, filasses, avec des faces moufflardes où s’azuraient de ferventes prunelles germaniques, ou tempéraments de bruns, le poil noir, des nerfs plus actifs, la chair plus dense, têtes résolues, basanées jusqu’à l’encolure, les traits décis, grands yeux félins à l’affût sous le velours des cils.

Ces légions dégageaient une effervescente odeur d’étable et de grange, mais aussi les séveux effluves d’une potée de corps luxuriants et copieux, secoués par quelques