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LES FUSILLÉS DE MALINES

essayerait-il de se dérober à ces démonstrations. Ses ouailles l’entourent, l’emprisonnent dans leur masse grouillante, le pressent à l’étouffer. Tant de mains cherchent les siennes ! Les mères lui tendent leurs enfants, c’est à qui lui arrachera un signe de reconnaissance, une parole d’intérêt. Tous parlent à la fois, s’égosillent, interpellent le vieillard, se nomment à lui : « Heer Pastoor, c’est moi Jann,… Voici Frans !… Vous souvenez-vous de Nardine, la femme du sacristain !… — Heer Pastoor, voici le petit Klaas de chez Mastboom… Ne connaissez-vous plus le vieux Verbist que vous avez administré et qu’un miracle a guéri… Mon petit dernier, baptisé par vos soins !… Heer Pastoor, Stann, l’aveugle, ne manque pas encore à l’appel… Soupesez le petiot, heer Pastoor !… Que Stann, l’aveugle, sente encore une fois la caresse de vos chers yeux !… L’enfançon doit cette chair au bon lait et aux œufs du presbytère !… »

Le curé ne trouve de paroles pour répondre à chacun de ses paroissiens. Il ne peut que dodeliner de la tête, abandonner ses pauvres doigts amaigris à la pression