Page:Eekhoud - Teniers, 1926.djvu/49

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les riverains du grand port commercial empruntèrent sans doute pour une part à l’aristocratisme espagnol et qui leur valut ce sobriquet de signor dont on les salue avec une légère pointe d’ironie.

Ce souci de distinction ne laisse pas de nuire parfois à la spontanéité du peintre à qui d’aucuns reprocheront de ne s’être pas suffisamment assimilé la frustesse et la turbulence, voire le débraillé de ses modèles. Et quant à ses incursions hors du domaine de la décence, elles sont en somme bien anodines et se bornent tout au plus à nous montrer — et encore moins souvent qu’on l’a prétendu — l’un ou l’autre de ses buveurs s’acquittant des fonctions auxquelles le Manneken-Pis de Bruxelles se livre sans répit et avec bien d’autre ostentation.

Comparé à Steen, à Craesbeke, à Brauwer, à Rubens, le Châtelain des Trois Tours, nous déconcerterait plutôt par la réserve et la bienséance qu’il apporte dans la peinture des scènes où les instincts des paysans s’extériorisent avec le plus de véhémence et où leurs mœurs tendent à s’affranchir de toute contrainte. Tout en les peignant au naturel il ne les dépouille point d’une réelle élégance et incline à nous les présenter sous le jour le plus avantageux. Les