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L’HELLÉNISME EN FRANCE. — 17e LEÇON.

amis, le poëte rédigeait pour labbé d’Elbene un petit Art poétique eu prose, qui a été plusieurs fois imprimé de son vivant et après sa mort (1). Bien qu’il l’ait écrit en trois heures, l’opuscule est encore assez long pour qu’on s’étonne d’y trouver si peu de traces du projet alors très-avancé de la Franciade : point d’observation sur les divers genres de poésies, sur les caractères et les règles qui leur sont propres ; sur tout cela Ronsard paraît se référer à ÏArt poétique d’Horace et à celui d’Aristote, auxquels il sait que son jeune ami n’est point étranger f 2) ; seulement quelques principes d’une certaine élévation sur le caractère religieux et moral du poëte, sur la différence du vrai poëte et du versificateur ; la recommandation de préférer un langage à la fois national et savant au parler de la cour, « lequel est quelquefois très-mauvais, pour être le langage des damoiselles et gentilhommes qui font plus profession de combattre que de bien parler » (3) ; çà et là quelques-unes de ces expressions qui sentent leur no-

(1) M— F. Wey, dans son livre estimable Sur les Révolutions du langage français, commet, à ce propos, une assez grave erreur, en rapportant la composition de ce petit écrit aux derniers mois de la vie de Ronsard, et en y voyant la preuve d’un certain affaiblissement d’esprit.

(2) Voir, plus haut, p. 332.

(3) A ce propos, il est intéressant de voir comment l’auteur se laisse entraîner, par.son admiration pour la Grèce ancienne, jusqu’à regretter l’unité de la France monarchique : plusieurs princes et plusieurs cours, comme il y avait chez les Grecs plusieurs républiques, auraient, selon lui, mieux favorisé l’émulation littéraire et le développement des richesses de notre langue (page 21, éd. 1586).