Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/146

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En vain plaisanta-t-il ; Sémelin ne prononça plus une parole et retira ses yeux si loin dans ses creuses orbites que plus rien ne vécut sur cette face stigmatisée par la mer.

Les jours suivants, Gaud rôda par les falaises, marchant sans galoches sur des chaussons de cuir. Il tendait ses lignes sous le phare, ou, par temps calme, passait des heures dans les enfléchures de son mât, la jumelle à la main, dominant l’îlot entier de son regard. Le soir il clava la porte de leur maison, qu’il n’avait point encore l’habitude de fermer, et, lorsque sa femme s’en fut pêcher des patelles du côté des Chevaux, il l’accompagna désormais.

Les garde-phare l’ignorèrent.

Sémelin n’existait plus hors le service depuis la journée du miracle interrompu. Durant les veilles, il lisait interminablement dans le Paroissien Romain, ou assemblait des coquillages en figures simples. Piron affectait de ne pas approcher du sémaphore, mais l’après-midi, il montait à une fenêtre haute d’où il pouvait voir la Gaude vaquer autour de chez elle.

Un matin le Martroger accosta la jetée du Pilier. Les hommes débarquèrent les approvisionnements, le charbon, le pétrole. Il ventait sec par-dessus l’île et des nuages tassés roulaient bas, crevant parfois en giboulées. Jean-Baptiste descendit du phare un sac sur le dos.