Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/19

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poches, l’œil embusqué dans l’ombre du béret, ils descendirent, l’air négligent, en roulant dans leurs galoches, sous les flancs du bateau.

Urbain fut presque saisi, mais volontairement il serra la brosse et se remit à peindre. — Pourquoi Perchais et les Aquenette n’étaient-ils pas en mer ?… Pourquoi venaient-ils justement ce matin ?… Bien sûr, un chantier c’est quasiment comme un cabaret, sauf qu’on n’y boit pas, la maison de tout le monde, où chacun entre à sa guise, s’assoit, regarde, cause… Mais comme ils arrivaient à propos, ceux-là, on aurait dit pour voir si le coup avait réussi, ou ce qui restait de leur crime…

Tout d’un coup, Urbain leva la tête vers les hommes et il les vit alignés, le dos à l’établi, les bras croisés. Son regard glissa sur leurs yeux et ils en soutinrent la pression parce qu’il ne s’arrêta sur aucun d’eux. Coët se disait : Quel est le coupable ? Mais eux connurent à son hésitation qu’il ne savait pas et ils se rengorgèrent dans l’assurance.

La barque s’enlevait au-dessus de leurs têtes, sereine et dédaigneuse avec ses bordées qui se retroussaient à l’avant le long de l’étrave. Grand-père, lui ajustait un parclos en tâtonnant et Théodore, là-haut, faisait sonner à coups de marteau le pont arqué comme un thorax. Et avant de reprendre son travail, dans un mouvement d’heureuse inso-