Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/292

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— Et pis t’as qu’à lire, reprend Clémotte.

Bernard a repoussé le béret de son front en sueur. Il saisit la feuille et la tient loin de ses yeux qui faiblissent. Sa chemise lui colle au dos, toute froide. Et soudain la feuille tremble au bout de ses bras en clapotant, retombe, et il dit :

— Misère !

Les autres n’osent point le regarder, craignent de remuer, sont émus. On entend des coups de marteau résonner à l’atelier et la voix de Clovis qui chante.

— Et le gars ? interroge Bernard.

C’est un vrai soulagement. Tout le monde parle de P’tit Pierre qu’on n’a pas voulu inquiéter, qui ne sait rien, qui travaille à côté. Mais déjà Bernard pousse la porte et l’appelle :

— Pierre ! Pierre !

Il paraît, en bras de chemise, la poitrine à l’air, éclatant de vie, avec du soleil derrière lui qui entre par la cour.

— Ton frère est mort, dit Bernard, voilà !

Le gars s’arrête au choc, fronce les sourcils et demeure stupide. Le brigadier s’écroule sur une chaise en murmurant :

— Et la mère ! la mère !

Des larmes roulent dans sa barbe, des larmes rares de vieux. P’tit Pierre lit le journal, les yeux écarquillés. La mère Zacharie et sa fille, revenues,