Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

limpide, frais, sous un ciel blanc, insondable, balayé d’une légère brise d’est qui sentait l’iode et le sel.

Près de la cabane du gabelou, le brigadier Bernard amorçait des lignes. Les hommes descendaient du village, parcouraient la jetée à grand bruit de galoches, embarquaient dans les canots. Ils parlaient peu. On entendait surtout sonner le bois, battre l’eau, grincer les chaînes et crier les poulies à l’appareillage.

Les sloops sortaient un à un, dressant haut dans l’air lumineux leurs voiles rousses, bleues ou jaunes, cambrant leur coque grise, largement ceinturée de vert ou d’écarlate.

Et sitôt la jetée doublée, les voilures déployées au vent arrière, ils couraient vers l’horizon en emportant du soleil.

Les yeux clignés, Urbain regardait s’éloigner les barques en les nommant dans sa tête. Il songeait au jour prochain où il prendrait rang dans la caravane. Mais un mouvement de défi lui raidissait involontairement l’échine à la vue du Bon Pasteur que patronne le Nain et du Laissez-les dire, dominé à l’arrière du colossal Perchais. Et il les suivait âprement, jusqu’au chenal de la Grise que masque la pointe fauve de la Corbière.

Quand il rentrait dans sa maison propre, bâtie à côté de celle d’Izacar le mareyeur, qui est riche,