Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/39

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dirent aux vieux et les galants qui vont attendre à la sortie des usines les filles tout imprégnées d’odeurs d’huile et de poisson, le répétèrent aux « connaissances » en les lutinant pour rire. Puis lorsque la nuit tomba, les hommes, qui ont coutume de fumer des pipes en causant, assis sur la murette devant l’auberge à Zacharie, commentèrent le fait et conclurent que Coët était vraiment un mauvais garçon pour les braver jusque dans le nom de sa barque. Et ils décidèrent d’aller en troupe le dimanche suivant voir ce fameux bateau.

Les gens de l’Herbaudière ne prennent jamais la mer le dimanche, non point en l’honneur du bon Dieu ou parce que c’est le jour du curé, mais simplement parce que les usines ferment et n’achètent pas la sardine. D’ailleurs les hommes ne vont guère à la messe qui est l’affaire des femmes.

Le samedi soir, toutes les barques rentrent à leur mouillage dans le port où elles se reposeront le lendemain, paresseusement couchées sur le flanc, à mer basse. C’est la journée du nettoyage. Le caleçon rouge troussé en bourrelet jusqu’aux genoux, les hommes briquent, frottent, peignent et le soleil, qui sommeille dans les flaques d’eau, rejaillit au contraire en éclaboussures sur le coaltar frais des coques rondes. Le sable est noirâtre, pailleté, impalpable, mais si bien tassé que les pas