Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/53

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regarda, le cœur serré, dériver sur les courtes vagues. Et à bord d’un caboteur, une vieille barbe ayant prononcé :

— Vla une barque qui commence par un sale temps ! elle éprouva de la tristesse, et, relevant la tête, elle sonda le ciel où les nuages se pressaient maintenant, compacts, hâtifs, en masquant définitivement le soleil. Alors elle dit à son homme :

— Je m’en vas, à cause des enfants et de la soupe.

Les deux frères demeurèrent seuls et s’attardèrent à travailler jusqu’au noir, sans pouvoir se résoudre à quitter cette barque, solide sous leurs pieds et qui était à eux.

La mer baissa. Le Dépit des Envieux fit son trou dans la vase molle et claire. Le quai le dominait ainsi qu’un rempart ; une odeur de salure fétide montait du port à sec ; le vent se déchirait dans les mâtures.

Urbain s’en alla en laissant Léon de garde à bord. Et, comme une heure après, il entrait au village par la traverse, derrière chez Viel, une ombre sortit d’une meule de foin, interrogea d’une voix craintive :

— Ton frère ne vient donc pas ?

Urbain reconnut Louise Piron qui attendait au rendez-vous quotidien.