Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/85

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du Vas-y-j’en viens se fend du haut en bas et s’envole en guenilles.

Au large les yachts virent la bouée de la Vendette et courent au plus près sur Pierre-Moine. Les Sablais endiablés filent sur la même route, et tout de suite après s’avancent parallèlement la voilure bleue du Laissez-les dire, la voilure rousse du Dépit des Envieux.

Les deux sloops ont appareillé aussi promptement l’un que l’autre et pris ensemble la tête de leur série. Malgré la forte brise, ils établissent chacun leurs flèches, téméraires et se défiant dans leur marche de front. À bord, les équipages à plat ventre guettent silencieusement les manœuvres réciproques. Urbain Coët est agrippé à sa barre, petit, ramassé, la face au vent, les regards sautillant de la barque à la bouée. Perchais au contraire est rejeté en arrière, la poitrine largement développée, la casquette sur les yeux et des deux mains il s’arc-boute à une barre neuve.

Sur l’estacade la Marie-Jeanne a retrouvé le père Couillaud et ses deux sœurs. Elles sont assises, avec leurs enfants entre elles, les jambes pendantes au-dessus de l’eau qui forme et déforme inlassablement des lacis d’ombre et de lumière, dans les pilotis, au-dessous d’elles. Les taches mobiles s’étendent, se rétrécissent, se pénètrent, se divisent, animées d’un mouvement amiboïde qui