Page:Eliot - Daniel Deronda vol 1&2.pdf/146

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cherait plus rapidement, et à son extrême surprise, bien qu’il se fût promis d’obtenir le consentement de Gwendolen, la journée s’était écoulée sans que rien de semblable fût arrivé. Ce fait étrange ne servait qu’à le faire persister davantage dans sa résolution et, de toutes les suppositions, celle qu’il aurait le moins admise, était que Gwendolen pût le refuser.

Il avait demandé la permission de lui envoyer un de ses plus beaux chevaux pour le monter ; madame Davilow devait suivre en voiture et, conduites par lui, elles iraient goûter à Diplow. C’était par une belle journée d’été ; la chaleur, tempérée par une douce brise, rendait cette course délicieuse.

Mais la paix et la satisfaction n’avaient pas pénétré dans l’âme de la pauvre madame Davilow, qui ne pouvait dominer son malaise habituel. Gwendolen et Grandcourt, qui tantôt partaient au petit galop et tantôt ralentissaient l’allure de leurs chevaux pour causer en attendant que la voiture les rejoignît, formaient, il est vrai, un charmant spectacle ; mais il ne servait qu’à entretenir le conflit d’espérances et de craintes qui régnait dans son esprit sur le sort de sa fille. L’occasion eût été irrésistible pour un amoureux qui aurait voulu mettre fin à ses incertitudes, et madame Davilow espérait, en tremblant, que la décision de Gwendolen serait favorable.

« Est-ce un homme avec lequel elle sera heureuse ? se disait cette tendre mère. Peut-être le sera-t-elle avec lui autant qu’avec tout autre, ou comme le sont la plupart des femmes ». Telle était la réponse avec laquelle elle essayait de calmer son inquiétude.

Les pensées de Grandcourt couraient dans la même direction ; il désirait en finir avec l’incertitude et ne s’imaginait pas que Gwendolen pût avoir un instant l’intention d’hésiter dans sa réponse. Celle-ci était heureuse de se sentir à