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XIV


Le lendemain matin, pareille à un beau lis qui vient de s’ouvrir, Gwendolen descendit aussi enjouée, aussi vive que si rien d’important dans sa vie n’avait eu lieu la veille. Il y avait en elle une réaction de jeunesse tellement énergique, que ses défiances n’avaient pas laissé plus de traces que n’en laisse après lui le caillou qui a ridé, pendant un moment, la surface de l’eau.

Le pique-nique de Cardell-Chase lui promettait un plaisir sans mélange ; elle se considérait comme une dryade au milieu des forêts, et la scène qu’elle s’imaginait prêtait du charme aux avances que ferait Grandcourt, lequel n’était pourtant pas un Daphnis bien passionné pour sa nymphe ; mais c’était tant mieux.

En entrant dans la salle à manger pour déjeuner, elle trouva des lettres à sa place. Après les avoir lues, elle en présenta une en souriant à madame Davilow, qui, en la lui rendant, sourit aussi, car la bonne humeur de sa fille la rendait joyeuse.

— Te sens-tu disposée à faire un aussi long voyage ? demanda-t-elle.