Page:Eliot - Daniel Deronda vol 1&2.pdf/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur un plan qui avait peu à peu germé dans son esprit, à mesure que s’était affaibli son espoir d’avoir un fils, pour tâcher d’assurer à lady Mallinger et à ses filles la résidence future de Diplow, malgré la clause testamentaire de son père. Ce qu’il savait des dispositions et de l’état des affaires de son neveu le portait à espérer que Grandcourt se prêterait à une transaction par laquelle, au moyen d’une certaine somme payée comptant, il renoncerait à ses prétentions sur Diplow et les terres qui en dépendaient. Si, par un effet inespéré du hasard, il lui naissait un fils, cet argent serait perdu ; mais sir Hugo considérait ce risque comme de peu d’importance, et, dans les dernières années, il avait si bien administré sa fortune, qu’il était plus qu’en état de faire ce déboursé. Voilà pourquoi il avait grand soin d’éviter toute querelle avec Grandcourt. Du reste, il s’était aperçu déjà que son neveu n’avait pas de rancune contre lui, et rien n’était survenu qui rendît entre eux tout arrangement impossible.

Grandcourt, quant à lui, considérait son oncle comme une superfluité et un ennui ; il se disait aussi que sa position serait bien meilleure si sir Hugo disparaissait. Il avait eu connaissance par Lush, son utile intermédiaire, des intentions du baronnet concernant Diplow, et il n’était pas fâché d’avoir de l’argent en perspective. Qu’il l’acceptât ou non, il était flatté de pouvoir refuser la demande de sir Hugo. Cette transaction avait donc été pour quelque chose dans sa demande d’habiter Diplow pendant un an, ce qui avait fort ennuyé sir Hugo, qui craignait que l’excellente chasse de ce territoire empêchât Grandcourt de consentir à abandonner cette propriété future ; d’autant plus que Lush lui avait insinué que Grandcourt épouserait probablement miss Arrowpoint, et qu’une somme d’argent le tenterait moins. C’est pourquoi, dans cette rencontre fortuite à Leubronn, sir Hugo fut très curieux