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les cheveux noirs de l’enfant. Il faut que nous nous séparions pour que tu reçoives l’éducation que je veux te donner. Du reste, tu trouveras bien des choses à aimer à l’école.

Daniel ne s’attendait pas à cela ; il se sentit soulagé et dit :

— Dois-je donc aller à l’école ?

— Oui ; j’ai formé le projet de t’envoyer à Éton. Je désire que tu sois élevé en gentilhomme, et, pour cela, il est nécessaire que tu ailles dans une école te préparer pour l’Université. Je compte t’envoyer plus tard à Cambridge, où j’ai été moi-même. — Qu’en dis-tu, coquin ? fit sir Hugo en souriant.

— Je désire être un gentilhomme, répondit Daniel avec fermeté ; j’irai à l’école, puisque c’est ce que doit faire le fils d’un gentilhomme.

Sir Hugo l’examina silencieusement pendant un moment, et crut deviner pourquoi l’enfant avait paru si indigné quand il lui avait proposé la carrière de chanteur ; puis il lui dit avec tendresse :

— Alors cela ne te fera rien de quitter ton vieil oncle ?

— Oh ! si ! répondit Daniel, qui pressa dans ses mains celles de sir Hugo. Mais ne reviendrai-je pas et ne serai-je pas avec vous pendant les vacances ?

— Si, parfaitement ! En attendant, je vais t’envoyer chez un nouveau maître, afin que le changement ne te paraisse pas trop dur lorsque tu partiras pour Éton.

Après cette entrevue, Daniel reprit confiante. Ses conjectures ne pouvaient être justes, puisqu’on voulait qu’il fût gentilhomme. Il redevint gai, et, jusqu’à son départ, la maison retentit de ses chansons ; il dansa avec les vieux domestiques, il leur fit des cadeaux et recommanda spécialement au groom d’avoir soin de son poney noir.

Tout alla bien pour Daniel dans le nouveau monde où il venait d’entrer, si ce n’est qu’un camarade avec lequel